Le rideau est tombé (ouch! mais y'a pas eu de blessés ni de morts graves), mardi 2 juillet sur le Festival International de la Création Sonore (F.I.C.S) qui a eu lieu à Jendouba. Une deuxième édition qui a tenu toutes ses promesses malgré l'absence des deux invités d'honneur: Brian Eno et Matthew Herbert. Cette édition a vu la participation de plusieurs artistes tunisiens dont plusieurs jeunes DJs de Jendouba. La révèlation cette année était sans doute Raouf Daldouli (a.k.a. DJ Track-Tour). Cet artiste tunisien complètement disjoncté a surpris le public avec un collage sonore à base d'enregistrements qu'il a effectués à travers le pays dans des restos spécialisés dans la restauration rapide ('okla sari3a' ou 'okla khafifa'). En effet, DJ Track-Tour a su fusionner des clips audio de gens entrain de déguster leur plat... lablabi, fricassé, plat tunisien ou encore un 'kasskrout kafteji' avec des rythmique allant du drum'n'bass, au jungle en passant par les breakbeats à la "squarepusher". L'audience était complètement en transe lorsque, devant ses platines et son notebook, muni d'un micro et d'une assiette de spaghetti, DJ Track-Tour a improvisé un nouveau morceau mélangeant une piste rythmique de dub avec des enregistrements en temps réel des sons d'aspiration des spaghettis qu'il avalaient comme un fou affamé. Cette performance intitulée "Mac Rouna Bissalsa" se termina en rythme Salsa endiablé sur lequel il superposa un vieux enregistrement audio d'un discours du Che. Par ailleurs, une autre performance qui a attiré l'attention du public est le "Shbloq Shblaq Riddim". Les trois frères Ferfouchi originaires de Fouchana (banlieue sud de Tunis) ont présenté un spectacle qui les place désormais à la pointe de la scène avant-gardiste de la création sonore. "En effet, le Shblaq Shbloq Riddim, nous expliquera Hassouna Ferchouchi, est un mode de création de nouveaux rythmes basé sur la manipulation de la relation entre l'objet et l'eau; l'objet dans sa dimension de projectile, abstrait, quelconque, limite anodin, et l'eau dans sa dimension, liquide, infini, mouillée". Sur scène, les frères Ferchouchi prenait à tour de rôle, des objets de toute sorte et les balançaient dans un bassin et ils enregistraient en temps réel le son produit lors du contacte entre l'objet et l'eau...effectivement ça faisait des "shbloq" et des "shblaq", ses enregistrements étaient directement manipulés par un programme informatique qui les transformait en rythme électronique. Interrogé sur la spécificité du matériel utilisé, Hassouna Ferchouchi a dit: "Le bassin qu'on a utilisé pour notre show est en plastic, plastic azrig, c'est un bassin mta3 ghssil saboun. Pour les objets nous avons pris des chaussures, des pierres, un téléphone portable, un appareil photo, shkara batata, et j'en passe...". Les autres artistes ont eux aussi apporté beaucoup d'originalité et de joie de vivre à Jendouba pendant ce Festival International. L'italien Massimo Tozz a chanté en russe et en continu pendant 5 heures (basé sur une technique très difficile à maîtriser) avant de s'évanouir devant un public désintéressé. Le duo japonais-grec, Sazuki Toshiba et Zorba Zaziki ont émerveillé le public en jouant de la percussion sur des machines à laver sur un fond de musique classique malgache. Le rideau est ainsi tombé (non, toujours pas de victimes civiles) sur le Festival International de la Création Sonore en laissant derrière lui une énergie artistique "pas normal" et un désir de création irrésistible. Bleda Rock sera bien sûr au rendez-vous à Jendouba l'année prochaine pour vous assurer la couverture de la troisième édition!

Pour Bleda Rock par J.L.N